La rubéole, enfin presque…

Publié le 24 Mars 2014

      Je vais vous raconter l’histoire la plus inattendue de mon séjour. Comme vous le savez peut-être déjà, je suis tombée malade il y a trois semaines. J’ai eu de hautes fièvres le jour du départ de mon binôme cardial, le vendredi 28 Février dernier.

      Pensant que ce n’est pas si grave, je me lève le lundi suivant, et participe aux cours, l’air de rien. Cependant, de petits boutons ont commencé à apparaitre sur mon visage. D’abord derrière les oreilles, puis, celà se propage tout au long de la journée. Je commence à m’interroger. Une allergie alimentaire ? Lorsque je vais à l’hôpital de mon université, le médecin rit et me dit que ce tout va bien. « Tu n’as pas de fièvre là ! Alors ça va ! » me dit-il.

Le mardi et le mercredi, je continue à venir en cours malgré la fatigue mais je demande à rentrer chez moi pour le dernier cours de la journée du mercredi. Je n’arrive plus du tout à me concentrer sur mes caractères chinois. La professeure accepte, puisque j’ai déjà traduit le texte que nous devions voir ensemble ce jour-là. Elle corrige et me libère. Je ne m’inquiète plus trop puisque les boutons au visage disparaissent et que la fièvre est tombée.

Jeudi, branle-bas de combat ! Une jeune fille est atteinte d’une maladie contagieuse dans la classe 9 ! Que les étudiants qui se trouvent faible ou malades aillent immédiatement se faire connaître aux bureaux ! Les professeurs sont en panique. Ils ont tellement peur que je n’ose pas expliquer mes aventures dermiques et hautes en températures à mon professeur de grammaire, qui est d’ailleurs sur le point d’évacuer d’urgence deux jeunes filles de la classe qui se disent « ooooh pas très bien du tout monsieur ».

C’est donc en prétendant aller aux toilettes que je vais sur le champ exposer ma situation à ma responsable. Elle m’envoie immédiatement à l’hôpital du campus. Le médecin à l’air bien moins rigolard en m’accueillant une deuxième fois dans son cabinet. Il me confirme alors ma maladie et m’ordonne de ne pas sortir de ma chambre jusqu’à nouvel ordre. Mes deux camarades qui ne se sentent « ooooh pas très bien du tout monsieur » s’en sortent avec un petit rhume.

C’est honteuse et en masque que je rejoins ma classe récupérer mes affaires, et m’enfuis aussitôt me réfugier dans mon dortoir. Entre temps, je capte des regards terrifiés et des expressions malheureuses parmi mes camarades asiatiques… (Les autres rigolent à la vue de mon masque). Mon professeur s’éloigne à mon passage. Serais-je atteinte par la peste ??

Cassandra doit changer de chambre. Elle sera à l’étage au-dessus pendant ma convalescence. Mes camarades et professeurs seront tous vaccinés le lendemain. Ma responsable me fait envoyer mes repas midi et soir par le restaurant situé au rez-de-chaussée de mon bâtiment. Elle m’achète du pain et de quoi petit déjeuner. Je suis là, seule dans ma chambre, je ne comprends plus trop ce qui se passe. Mais tout ce chambardement aura eu l’effet de déclancher : la suite.

Cette nuit-là, la fièvre est très élevée. Je gronde toute seule, maudissant la distance entre la chine et mon "chez-moi", où logiquement je ne serai pas là, seule, à subir la fièvre sans que personne ne puisse me donner mon verre d’eau sucré que j’aime tant lorsque je suis malade. Chaque petit bruit m’insupporte et chaque lumière est une aiguille dans les yeux.

Le lendemain, je suis réveillée à 10h par trois infirmières et ma responsable, toutes portent des masques. J’arrive à peine à me lever. Mais lorsque je réussis à ouvrir la porte, ce sont des « OOOOOOH » et des « AAAAAH » qui me font réaliser que je suis terrifiante à regarder : des yeux rouges globuleux à la gollum, des millions de petites plaques rouges qui sont apparues partout sur mon corps, de la pointe de mes orteils jusqu'à la pulpe de mes doigts. Sans parler de mes cheveux qui auraient été aussi bien rangés si je les avais coiffés avec l’aspirateur… Je tiens à peine debout et ne peux enchainer deux mots sans quelques essais préalables. Mes phrases ressemblent plus à un Kamoulox russe qu’à du chinois ! On me fait une prise de sang et m’envoit 5 médicaments chinois (dont je mettrai une demi-journée à comprendre la prescription et le mode d’administration).

Commence alors un looooong processus de guérison. Pour faire des analyses supplémentaires, ma responsable m’amène une première fois à l’hôpital du quartier de Haidian, en compagnie de la Coréenne de la classe 9 atteinte du même mal. Je vis ma première visite dans cet hôpital comme un petit séjour touristique. Je suis curieuse de voir le fonctionnement d’un hôpital chinois.

L’hôpital de Haidian est un hôpital qui n’accueille généralement pas d’étrangers, puisqu'ils  se dirigent vers les structures plus rassurantes où les médecins parlent tous anglais et ont à peu près toute les nationalités possibles.

Je me dirige vers un bâtiment qui a l’air tout neuf. Je me dis qu’il ressemble à n’importe quel hôpital finalement. Mais une fois à l’intérieur, c’est la panique ! Des caractères chinois jamais aperçus de tous les côtés ! Avec des flèches et des couleurs pour différencier les différents services et accueils aussi nombreux que le nombre de patients qui attendent pour se faire enregistrer. Et croyez-moi, ils sont nombreux. Je suis bien heureuse d’être accompagnée par une chinoise pour nous éviter le Kamoulox niveau expert. A l’accueil, je comprends que le « service des fièvres » se trouve à l’extérieur du bâtiment, isolé des autres patients.

En effet, 10 minutes plus tard, je me retrouve dans un « algeco » aménagé en infirmerie. L’infirmière de service nous accueille presque en soufflant. Nous l’avons dérangé pendant qu’elle regardait une série télévisée chargée sur son téléphone. Je vois une dizaine d’infirmières riant et discutant dans les couloirs. Je suis surprise lorsque qu’on nous dit qu’ils sont débordés et que l’on tombe mal.

Ici, nous payons d’abord les frais. Ensuite le médecin nous ausculte, puis s’en suis 4 prises de sang et une prescription de médicaments longue comme un bras.

Je suis surprise de voir l’hygiène un peu douteuse dans un hôpital. Par exemple, je dois passer mon bras par une petite fenêtre aménagée dans un mur pour que l’infirmière assise de l’autre côté prélève une quantité (inquiétante) de sang. J’aperçois une dizaine de petits cotons ensanglantés et des pansements usagés qui jonchent la petite tablette sur laquelle je dois poser mon bras. Pour ma radio du poumon, je vois deux belles traces mammaires (flagrantes) sur la plaque contre laquelle je dois presser ma cage thoracique…

Je crois que le moment le plus traumatisant de cette journée restera la prise de sang à la base de mon pouce. « Parce qu’ici, le sang n’est pas le même » me dit la jeune femme. Leçon de biologie que je ne suis pas prête d’oublier.

C’est fatiguée et les bras bardés de pansements que je quitte l’hôpital. Je ne retournerai pas en cours avant le lundi 17 Mars. Je fais une petite visite de routine tous les trois jours. Chaque fois la même routine. Ils me prélèvent une goutte de sang et me prescrivent de nouveaux médicaments. Puis je rentre, persuadée de pouvoir rattraper mes cours, alors que je finirai par végéter dans mon lit, devant un film quelconque. On m’apporte mes repas, je prends mes médicaments, je dors, la femme de ménage désinfecte tout les jours le couloir et la moquette de ma chambre avec un pulvérisateur, une infirmière m’appelle tous les matins pour avoir ma température, ma responsable demande de nos nouvelles… Je suis surveillée. Un matin, je sors faire ma lessive. C’est avec un air sournois que la femme de ménage s'en va cafter à la réception. Mon téléphone sonne, je me fais réprimander.

Une semaine de vacances forcées c’est cool ! Une semaine enfermé dans sa chambre sans voir personne alors qu’il n’a jamais fait aussi beau depuis des mois… il y a mieux.

Samedi, j’ai l’autorisation de faire une sortie. Avec masque obligatoire, évidemment. C’est avec un sentiment de bonheur extrême que je me retrouve en plein soleil. Mes yeux me font un mal de chien mais je suis bien trop heureuse pour me plaindre. Je cours m’acheter la plus jolie des robes dans mon magasin préféré pour fêter ma sortie.

Lundi, c’est sous les applaudissements de mes camarades que je réintègre ma classe. Malheureusement, mon amie coréenne n’est pas encore assez en forme pour réintégrer la sienne. Ses poumons sont trop touchés. Elle reprendra les cours jeudi.

Une semaine passe, puis deux. Je tousse toujours pas mal mais globalement je vais bien. J’ai la peau d’un nouveau-né et j’ai perdu le surplus pondéral gagné pendant mes vacances de folies culinaires. Je me sens bien dans ma peau et je suis prête à affronter les trois mois qui me restent avant mon retour !

Nous sommes le Lundi 24 mars. Je commence à oublier mes récentes aventures. C’est alors qu’on m’annonce qu’une fille que j’ai vu 30 secondes avant ma mise en cage est tombée malade. Elle a… la Rougeole !! Le doute m’envahit. Pendant des semaines j’étais persuadée d’avoir la Rubéole. En effet j’avais appelé un médecin français pour lui demander conseil. Il m’avait dit qu’il pouvait vraisemblablement s’agir de la rubéole. J’avais aussi fait une recherche rapide pour savoir comment dire « rubéole » en chinois et le mot qui en ressortait était « 风疹 ». C’est ensuite que j’ai réalisé que le mot que les médecins utilisaient depuis le début était en fait « 麻疹 » qui lui ressemble assez pour que lorsque j’étais malade, je ne fasse pas attention à la différence. « 麻疹 » qui signifie en fait : Rougeole. Je vérifie 4 fois mon livret de l’hôpital sur lequel il est bien indiqué « rougeole ». Voici depuis le début que je pense avoir une maladie sans conséquences alors que cela aurait pu tourner bien plus mal que ce que j’ai vécu à cause s’une erreur de traduction et d’une mémoire de poisson rouge ! Peut-être que l’ignorance m’aura épargné des maux plus importants.

Cassandra est revenue dans la chambre il y a quelques jours. L’agitation me fait finalement du bien.

Quelle aventure… Je vous avoue que cet évènement a bien avancé mon envie de rentrer au pays. Pendant quelques jours, j’allais en cours juste pour faire passer le temps plus vite. Je ne voyais personne et rentrai tout de suite après les cours. Tout ce que j’attendais c’était de monter dans l’avion.

Aujourd’hui, j’ai une autre vision des choses. Heureusement. Je me dis qu’il ne me reste que trois mois pour profiter des occasions exceptionnelles que peuvent m’offrir Pékin. Le temps passe vite ! Il ne me reste que 13 semaines ! Je vous promets de continuer mes visites et de prendre autant de photos que possible.

Petite parenthèse : Je n’ai jamais mangé des médicaments aussi dég…. Hem… efficaces que les médicaments naturels chinois. En effet, 5 minutes après difficile ingurgitation, les symptômes les plus difficiles à vivre s’évaporent (et sans vous assommer). Les effets ne durent peut-être pas aussi longtemps que pour un médicament ordinaire (la prise en est plus fréquente), et le goût n’en est pas plus agréable, mais le soulagement immédiat est tout de même très apprécié lorsqu’on est au plus mal.

 

Ps : Pas de photos, c'est une horreur !! haha !

Rédigé par Julie

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C
Houlaaaa ! Ça fait super peur ! Tu as dû avoir une semaine infernale ! Et avec l'hygiène chinoise ça doit alimenter l'angoisse.<br /> Rétablis toi bien !
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